L’association du schématisme d’un signe d’écriture, avec l’expressivité d’effets de matière, offre une belle complémentarité.
On peut faire de belles matières picturales en-dehors de tout dessin, et de l’écriture purement graphique sans matière, mais quand on fait se rencontrer ces deux-là, signes et matières, il se passe quelque chose entre peinture et écriture, et cela nous parle en silence.
Ci-dessous, 5 compositions commentées : Françoise Guillemare, Marina Cionna, Nanou Casas, Agnès L-D Steeg, Dominique Charbeau.
Composition de Françoise Guillemare : le fond est composé d’une mosaïque de papiers ou tissus de textures variés, collés sur un rythme simple d’horizontales et de verticales pour ne pas embrouiller la composition, et unifiés par un frottage de blanc faisant ressortir le dessin des reliefs. Le dessin très sobre, inspiré de signes d’écriture, occupe franchement chaque format pour se détacher nettement de la matière elle-même très présente. Ce dessin est d’abord peint en noir, puis le noir est recouvert d’une couleur frottée qui laisse un contour et des traces de noir, pour l’intégrer au fond sans écraser celui-ci. La composition est constituée de deux peintures elles-mêmes décomposées en deux panneaux, cet effet de répétition dans la variation contribuant à assurer la présence et l’efficacité visuelle du motif abstrait.
Composition de Marina Cionna : le fond est composé de papiers imprimés collés avec du gesso puis arrachés pour laisser des traces. Le fond se trouve ainsi animé par des effets antagonistes : turbulence des arrachages, et cadence des horizontales et verticales laissées par les morceaux de papiers découpés. Les signes apparaissent par des lavis dont la transparence s’enrichit de la matière du fond. Ces lavis sont parfois en plein, d’autres fois en réserve, pour une intégration plus subtile du dessin dans la matière.
Composition de Jeanne Casas : les signes sont découpés dans du papier fort, puis collés sur un autre papier fort pour se détacher en relief. Le collage est entièrement recouvert de noir. Quand le noir est sec, il est entièrement recouvert de blanc, puis le blanc est aspergé de gouttes d’eau que l’on fait ruisseler. Quand le blanc est en partie sec, on passe la composition sous le robinet. Le blanc qui n’a pas séché s’en va, en ruisselant le long des lettres en relief. Le noir et le blanc apparaissent ou disparaissent de façon aléatoire, mais pas complètement aléatoire puisque les signes en relief canalisent leur répartition, prenant l’apparence d’écritures anciennes ayant subi quelques siècles d’hiver.
Composition d’Agnès L-D Steeg : association de formes découpées et collées, de travail au pochoir, d’apport de textures de mortier, et de modelés d’ombres et de lumière pour accentuer les reliefs.
Composition de Dominique Charbeau : signes travaillés au pochoir, en utilisant une abondance de couleurs bien mouillées pour qu’elles passent sous le pochoir, créant des débordements avec des effets de flous.