Un coup de fil à passer à une amie, un plat que l’on goûte, une émission de télé regardée d’un œil distrait, des comptes à faire : nous sommes sans cesse traversés, occupés par un nombre infini d’actions, d’idées, de sensations, visuelles, auditives, tactiles, gustatives, olfactives… et aussi pratiques, machinales, affectives. N’importe quel ordinateur exploserait, s’il devait traiter autant d’informations et d’actions qu’un être humain normal dans sa vie courante.
Aussi, l’être humain non seulement normal mais artiste découvre un beau jour qu’une peinture, par exemple, si elle veut rendre compte du monde réel dans sa complexité, peut faire appel au collage pour attraper au vol des échantillons sensibles de cette complexité.
L’art du collage paraît bel et bien inventé pour décrire ce monde où nous vivons, avec sa culture et sa technologie qui nous font être ici et ailleurs en même temps.
Matière première
Au paléolithique, les artistes peignaient avec ce qu’ils avaient sous la main : terres, pigments, charbon de bois… (il n’existait pas de magasins de beaux-arts à l’époque). Aujourd’hui, nous disposons d’une autre ressource abondante de matière colorée : les imprimés publicitaires et les magazines. Cette matière première peut être employée de deux façons : par collage des images ou des textes, pour ce qu’ils représentent. Par utilisation pure et simple de la couleur et de la matière des papiers, sans tenir compte de leur contenu illustratif.
Composition ou juxtaposition
Dans la technique du collage d’images, les problèmes de composition sont les mêmes que lorsqu’on dessine. En effet, la difficulté réside dans la hiérarchisation des motifs. Ceux-ci doivent entretenir des relations entre eux, sans être simplement juxtaposés, sauf si la juxtaposition est un parti pris comme chez les Nouveaux Réalistes ou dans le Pop Art. Un bon mode d’organisation consiste à prendre un élément du collage comme fond, et à rajouter dessus un élément ou deux, mais pas plus. Les relations entre deux ou trois images seront plus faciles à créer, et produiront plus clairement une signification, que si les images se gênent par leur nombre. Cela dit, chez un artiste comme Erró, l’accumulation d’images constitue un effet en soi. Mais alors, cent images d’objets deviennent en fait une image de cent objets. Et on se trouve toujours en présence d’un ensemble simple, d’une unité.
Liaisons
Une autre difficulté du collage dans la peinture se trouve dans la liaison entre le peint et le collé. Cette difficulté se résout dans la façon de découper les images. De même qu’une ligne au pinceau ou à la plume n’a pas le même impact, une découpe au ciseau diffère d’un déchirage à la main. L’ébarbage grossier du papier que provoque une déchirure permet une jonction plus nuancée entre peinture et collage.
La technique du « transfert » est un autre moyen de réussir cette jonction. Vous enduisez une image de gesso ou de liant acrylique, pour la coller sur votre support (papier ou toile). Après quelques minutes, décollez le papier : celui-ci se décolle partiellement en laissant une fine pelure au travers de laquelle s'aperçoit l'imprimé badigeonné de gesso ou de liant. Il est possible aussi de badigeonner le support au lieu de l'image, pour le même effet. Cette technique permet d’utiliser l’image en tant que trace, sans s’assujettir à ce qu’elle représente.
Patines
Si vous utilisez le collage de papiers pour leur seule couleur sans vous soucier des images, une autre technique s’offre à vous : après avoir solidement fixé une mosaïque de fragments colorés avec un liant acrylique, vous les frottez avec une éponge grattante humide pour les user, avant de les recolorer au moyen d’un lavis. Vous obtenez ainsi des couleurs richement patinées, où les teintes de votre palette s’enrichissent de leur rencontre avec celles des imprimés.
Le souvenir rejoint le rêve - Fondation Veeska
Un étrange frisson à la naissance des ailes qui nous poussent dans ces moments où le souvenir rejoint le ...
https://www.veeska.com/2021/01/le-souvenir-rejoint-le-reve.html