Nous sommes en permanence nécessaires à la création quotidienne du monde...
Pour les lois de la thermodynamique et de l’entropie, tout ce qui est créé est entraîné tôt ou tard de l’ordre au désordre. Tout finit bien sûr par s’affaiblir et se débiliter, tout ce qui était juste devient faux avec le temps, tout ce qui était beau et lisse se craquelle…
… Mais au lieu de nous en affliger, nous devrions voir là la sagesse primordiale de la création qui ne nous livre pas une fois pour toutes un réel achevé, parfait et durable, mais nous invite en permanence, dans le respect des lois ontologiques et des structures d’un ordre de l’amour, à réactualiser, à remettre à neuf ce qui s’étiole, à réinventer des contenants et des contenus, à faire que soit neuf ce qui était hier usé, que soit étincelant ce qui était hier terni. Nous sommes en permanence nécessaires à la création quotidienne du monde. Nous ne sommes jamais les gardiens d’un accompli mais toujours les cocréateurs d’un devenir.
Vous commencez par un fond polychrome, un fond informel juste pour le plaisir de manipuler la couleur et sa matière, pour en éprouver physiquement la vitalité première. Vous brossez ce fond avec plusieurs nuances d’acryliques allongées d’eau et de médium pour obtenir une consistance visqueuse. Sur ce fond humide voire mouillé, vous posez brièvement un papier plié ou froissé. Les plis du papier vont marquer les couleurs de leurs dessins aléatoires. Après séchage de cette première étape de votre peinture, vous définissez à l’intérieur de celle-ci une surface rectangulaire. Dans ce tableau à l’intérieur du tableau, à la délimitation très lisible, les lignes floues et les couleurs diluées sont reprises au pinceau fin pour devenir nettes et précises, comme si vous en faisiez la mise au point. A moins qu’il ne s’agisse de la mise en culture d’une friche de peinture sauvage.
Variantes de cet exercice :
Les formes aléatoires et floues à la base de votre composition peuvent provenir d’un autre effet de matière et de couleur : ci-dessous, un papier découpé avec des formes géométriques issues d’un exercice d’écriture imaginaire (voir n°99a), a d’abord été d’abord enduit de peinture dans des tons neutres. Puis il a été appliqué sur une autre feuille pour y déposer des traces. Le détail sélectionné a été enrichi de détails et de couleurs jusqu’à faire apparaître une suggestion de paysage.
L’exemple suivant part d’un monotype en blanc sur noir, également créé sur la base d’un exercice d’écriture imaginaire. Le cadre de mise au point souligne en couleur les nuances de textures sous-jacentes, et en fait apparaître le dessin.